Coup de tonnerre en France ! Le grand Emile Zola prend ouvertement le parti du Capitaine Alfred Dreyfus en adressant une lettre ouverte, parue dans le
journal « L'Aurore », au Président de la République
Félix Faure. Rappelons les faits : trois jours auparavant, le Capitaine Dreyfus, de confession juive, avait été accusé à tort d'espionnage alors que le vrai coupable, le capitaine Esterhazy avait été acquitté par le Conseil de guerre. Il faut dire que l'armée avait tout fait pour brouiller les pistes en dissimulant des preuves ou en les falsifiant, se cachant de plus, derrière le secret d'Etat. Les accusations publiques de Zola portent surtout sur la violation du droit par le Conseil de guerre et pour ce faire, l'écrivain nomme publiquement les vrais coupables, appartenant tous à l'élite de l'armée française. En agissant de la sorte, autorisé à publier par Ernest Vaughan, directeur de « l'Aurore », ce qui restera bien plus qu'un pamphlet dans les mémoires, prend d'énormes risques. Il peut en effet être arrêté et condamné pour diffamation. C'est justement ce que recherche Emile Zola, lui, le grand écrivain
couvert de gloire... Un procès public afin que la Justice républicaine soit considérée comme prépondérante par rapport à la Justice militaire. Ce « J'accuse » fait l'effet d'une bombe car à l'époque, la France était complètement divisée entre « Dreyfusards » et « Anti-Dreyfusards ». Une pétition en faveur de Zola circule y étant apposées d'augustes signatures provenant des intellectuels ou des hommes politiques. On y trouve Georges Clemenceau qui fait ainsi sa rentrée politique mais aussi Léon Blum,
Marcel Proust, Anatole
France... Le Président du Sénat, « Dreyfusard » doit démissionner mais Emile Zola est condamné à un an de prison le 23 février 1898. Pour éviter la
prison, Zola se réfugie en Angleterre. Le pays se déchire. Une campagne antisémite se développe sous l'égide de Maurice Barrès, des magasins juifs sont brûlés ainsi que des synagogues. Dans l'armée existent heureusement des membres honnêtes comme le commandant Picquart mais c'est le colonel Henry, trahi par ses supérieurs, qui met à jour l'affaire du bordereau en août. Il s'agit d'un document trafiqué accablant Dreyfus. Le colonel Henry avoue son acte, est emprisonné au Mont-Valérien et se suicide. Le Ministre de la guerre, Godefroy Cavaignac doit démissionner devant le scandale. Dreyfus, envoyé au bagne durant tout ce temps, est autorisé à en sortir pour l'ouverture du nouveau procès demandé par Dupuy, le successeur de Cavaignac. Le nouveau procès s'ouvre à
Rennes. L'ambiance est complètement survoltée, l'avocat du capitaine Dreyfus, Maître Labori, est même blessé par un coup de feu. Les plaidoiries sont interminables, les membres de l'armée paradent en uniforme, se taisent encore sous prétexte de secret d'état. Dreyfus est encore jugé coupable de haute trahison le 9 septembre 1899 mais la peine est commuée à 10 ans au lieu de la perpétuité. Le nouveau
Président de la République Emile Loubet accorde sa grâce mais Dreyfus, touché dans son honneur, la refuse, exigeant l'acquittement. Auparavant, les passions s'étaient encore déchaînées avec l'épisode de Fort-Chabrol qui voyait les débordements « patriotiques » de Déroulède et de Jules Guérin qui furent tous deux condamnés. Clemenceau, rentré en piste, en profite pour fonder le premier parti politique, le parti républicain radical en 1901. L'affaire Dreyfus prend fin le 12 juillet 1906 : le capitaine est innocenté par la
cour de cassation et il est fait chevalier de la
légion d'honneur le 21 juillet de cette même année. Réintégré dans l'armée en tant que simple chef d'escadron, il démissionne. Le commandant Picquart, le seul à l'avoir défendu au sein de l'armée, est nommé Général puis Ministre de la Guerre par
Clemenceau. Quant à
Emile Zola, il meurt asphyxié le 29 septembre 1902. Ses cendres furent transférées au
Panthéon le 4 juin 1908, ce qui marqua la vraie fin de l'affaire Dreyfus. L'article « J'accuse » restera dans les mémoires comme le symbole de l'engagement politique et de la montée en puissance d'un nouveau pouvoir : celui de la
presse...
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